inactualités et acribies

inattendue broquille ronde et piquante d’un lundi matin

11 Mars 2024 , Rédigé par pascale

 

 

Je me souviens de ce mot, l’étonnant inconnu de beaucoup — smectique — lu en avril 2020 *, c’était hier, tous masqués sauf les yeux et confinés sauf les doigts, heureusement non gantés pour tourner les pages des livres en retard d’ouverture mis-de-côté-pour-plus-tard-quand-on-aura-le-temps, c’était le moment … encore fallait-il passer par le rite nouvellement entré dans les maisons privées du passage à savon des mains qui tiennent, prennent, soupèsent, attrapent, ouvrent, ferment, poussent, posent et reposent toutes choses niaisement. Nous apprenions l’obligation d’apprendre à nos mains à penser : il y avait là et partout peut-être bien, des milliards pour le moins des centaines de milliers d’animalcules possiblement mortels, indéniablement malfaisants et contagieux dont il fallait se prémunir. Le coup fut rude, très rude, mais comme tous les coups, il passa. Restèrent les états de nos âmes, différemment affectées, c’est le mot.

Surtout ne pas chercher à savoir — un comble pour la frappadingue de la comprenoire dont je suis — pourquoi ce mot dont la prononciation contredit l’onctuosité de l’objet qu’il vise, ni où smectique s’était logé pendant tout ce temps, ni pourquoi il refait une bulle un lundi matin de mars, le ciel presque bleu dans un silence quasi parfait ; sinon que l’esprit frappadingue frappe toujours et bien qu’une souvenance unguineuse ait la suavité d’un savon gras, elle ne glisse pas dans le néant mais se glisse dans une boucle d’instants détachée du présent urgent.

Tout à l’inverse du désastre des oursins qui obsède et bouscule le rare sentiment de vide de conscience qui parfois peut soutenir un léger équilibre au-dessus du naufrage du monde, des ruines de l’époque, de l’effondrement du temps. Trois mots, ou deux, deux mots qui, sans la moindre chance autre que les associations libres dudit esprit toujours un peu brissettien et flottant au gré de son auriculaire et auditif attachement aux sons des mots : des astres et des oursins … ou des oursons, hein ? où le petit de la Grande Ourse m’attire par ses cheveux (d’ange) vers le ciel admirer les espaces infiniment silencieux et mes souvenirs et se méfier de leurs piquants, autant d’aiguilles plantées aux nuées de la mémoire désastreuse du houx sain … Saint Jean-Pierre Brisset, au deuxième mois (dit Haha) du Calendrier de Pataphysique, la veille de la « Commémoration du cure-dent » dont l’un des mâchouilleurs les plus célèbres – après A. Allais bien sûr – est l’amiral – j’y entends admirable, ce dont je ne puis juger – Gaspard de Coligny, assassiné à la Saint-Barthélemy, qui pour beaucoup hélas ! est synonyme de saint glinglin, le saint de toutes les promesses non tenues, qui existe bel et bien puisqu’on le fête en faisant la Foire dans quelque(s) village(s) de France – retenons, pour revenir à nos bulles d’entrée, celle de Châlons-en-Champagne, qui, l’écrivant, fait mes yeux pétiller. Quand je pense qu’il y en a qui répondent qu’ils ne sont pas très bulles ! quand on les invite à partager la divine et toute laïque boisson mise à l’honneur et au goût des élégants par Saint-Évremond en son exil londonien ** !

Seraient-elles dévolues à la dimension smectique du monde, les heures fondent que l’on passe à écrire, comme le savon dans l’eau – « ça et vont » et « ça fond et vont » – dans l’eau, nous le savons bien, le moussaillon des eaux, des « Ô » qui spument pour nous sur l’écume des jours.

* archives, « Du savon, des dauphins, des confins » – 1er avril 2021 ; ** archives, « Le philosophe et le champagne » - 25 septembre 2017

 

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